Le langage de la vérité. C’est ce dont la lutte contre la gabegie a besoin aujourd’hui. Nous devons présenter la Mauritanie « comme elle va » avant de penser à celle que nous voulons qu’elle soit. Bâtir sur le faux c’est le consolider, et donc empêcher le progrès.
J’ai été admirablement surpris par le propos du ministre de l’économie et des finances évoquant la situation alarmante de 600 mille Mauritaniens menacés par la famine ! C’est ici le langage de l’économie et des statistiques, non celui de la politique. Mais, il y a un hic. Le discours est orienté. Il s’adresse aux bailleurs, aux partenaires techniques et financiers de la Mauritanie pour leur soutirer « quelque chose ». C’est de bonne guerre, me dira-t-on. La mobilisation des financements est une bonne pratique que tout gouvernement doit savoir exercer pour avoir les ressources financières nécessaires aux projets de développement mis en œuvre. Jusque-là, rien à dire.
Mais si vous utilisez l’argent du contribuable pour le confort et le bien-être des hauts responsables, c’est une dérive qui s’apparente à la gabegie. Acheter des voitures qui coûtent des dizaines de millions d’ouguiyas pour qu’un directeur ou un coordinateur de projet se déplace confortablement sur les avenues et routes de Nouakchott n’est d’aucun apport pour les citoyens démunis. Utiliser cet argent dans des frais de mission mirobolants, des séminaires ou d’ameublements de bureaux surfacturés relève de l’inconséquence, voire de la gabegie. On ne doit pas prendre aux institutions financières internationales, au nom des pauvres, pour donner aux riches.
Si le plaidoyer du ministre de l’économie et des finances permet d’obtenir une aide substantielle destinée aux 600.000 Mauritaniens menacées par la famine, il faut que 90% de cette enveloppe aille à ces « damnés de l’opulence » qui vivent dans les coins les plus reculés du pays, pas que cet argent serve à ce gouffre qu’on appelle « fonctionnement », alors qu’il s’agit, dans la réalité, de "ponctionnement" !
Sneiba M.